Déchire les images, déchire-les
comme des miroirs, et puis alors brise-les puisqu’elles sont vitreuses et que
les images sont ça ou plutôt ne sont que ça,
des miroirs,
plus trompeurs que le verre,
sans fond - et mentir de bonne
foi bonne ça excite ça angoisse de manière bien utile -,
et plus saloperies qu’une
mémoire,
les images,
et plus impromptues et plus
vertigineuses,
c’est vrai,
plus vitreuses que les vitres
des miroirs derrière lesquelles on voit comme ne nous échappe pas le vent de
soi à s’éloigner fantôme quand on approche son propre visage et regarde
au-delà ;
les fantômes sont partout c’est
ce que je me disais quand je rentrais en ville, en petite ville, dans les
premières fois des allers et retours que tu me connais entre ici et là quand je
me cachais et qu’on ne me cherchait pas,
mais j’étais dans le nœud de la
traque,
j’étais, tu es, il, elle, on était
où chacun est : chacun est chasseur de la proie,
de la proie intime,
la bestiole qui le dévore, qui
n’en finit pas de le dévorer,
mais elle est de la pierre,
c’est heureux
sinon…
Montre tout, ne cache rien et
surtout, surtout, qu’on ne te voie pas !
A ton tour sois fantôme, l’ombre
d’une métamorphose, un sourire au nombre, à la distance,
une multiplication,
qui regarde quoi ?
Et qui ricane à quoi là-dedans,
dans la lentille,
une fois la chair perdue et tout
offert à tout ?
Déchire les images comme les
robes de la vie moderne très moderne où on nargue en fermant les lèvres et
refuse le soupir,
qui plastronne ?
Donne-leur des yeux, du défi, du
khôl de l’ambiance des baignades
de jouvence
pour combien de temps ?
C’est leur problème.
Il y a du mensonge dans les
corps des filles froides.
Est-ce donc ce qu’elle voit ou
bien elle se voit, elle, ou elle ne voit que ce qu’elle serait si et seulement
si ou bien ce qu’elle n’est pas ou même,
ce qu’elle fut et sera… ?
Elle ne voit pas puisqu’elle
brise à moins qu’elle ne continue de voir s’assembler les bris quand ils sont
éparpillés et recouverts,
il reste des bris,
et plus que des bris,
il reste des pains gel,
des miroirs
épais
mais qui portent perruque.
Il y a du mensonge dans les
fantômes comme dans les poupées que les fillettes coiffent, défigure !
Allez !
Allez dévisage !
Allez, allez déchires mais
recouds après avoir tanné à l’empreinte appuyée la peau froide,
tanné assez pour qu’elle ait
chauffé jusqu’à cuire et s’incarner,
déchires,
défaits la paille dans les
œillades, ravis et séquestre cette bouche, ce diamant,
sertis ou bien épate ce bobard,
défais les lacets de luxe défais
le corsage
d’être(s).
- J’autopsie.
- Et après ?
- J’embaume.
- Et après ?
- J’autopsie.
Une autre.
Je passe à la
suivante.
- Et de qui, de quelles filles tu crèves les peaux comme
ça ?
- De mortes, j’autopsie je t’ai dit.
- Mais, elles n’ont jamais existé, je crois
bien, je crois qu’elles-mêmes sont des double, et on a de multiples double,
regarde-les, regarde leur air perdu, elles ne savent plus rien, elles ne se
reconnaissent pas, elles ne se sont peut-être jamais connues.
- Ca ne fait rien.
- Et après ?
- J’embaume.
- Et après ?
- Je fonds la glace des mirages.
Elle fait de l’eau.
Je la mélange au fard, au gras et au reste et je
l’oublie là sur le sol des étangs.
Je laisse.
Ca sèche.
Les mirages changent comme la
neige
J'embaume, texte de mathieu diebler présentant l'exposition de Mathilde Tixier à la Galerie FRICHEZ NOUS LA PAIX du 02 au 09 avril 07, vernissage mardi 03 de 18h à 22h.
Galerie Frichez Nous La Paix
22 rue Dénoyez
Paris 20 Mo Belleville