vacance
En Afrique je n’irai jamais. Ni en Asie. L’Amérique que dalle.
Je déteste les voyages. Et trimballer mon ennui alors que j’aurais quelque chose à faire si je n’étais pas parti, pourquoi suis-je parti ?
Partir est une occupation de l’adolescence et celui qui continue de partir est un enfant qui ne finit pas de grandir, ou qui a grandi et s’est arrêté avant le terme et voyage pour le trouver, le terme. Pour le voyageur, il n’y a pas de terme. Même la mer, même la mer ne l’’arrête pas.
Quand il a pu, le voyageur a inventé le bateau, quand il a vu que des choses flottaient sur l’eau. A-t-il eu le flair du gel et marché vers là où il faisait froid, et gel, et on marcherait sur l’eau ? Il y a ceux sauvages qui passèrent par le Nord glacé mais ils furent massacrés par d’autres mais. Peu importe la part du feu, celle du hasard, la fin de la terre n’arrête pas le voyageur. Ca le bloque, un peu, ça l’eut surpris même, ça ne le surprend plus, il a, quand la tempête le lui lâche comme une piécette à un mendiant, le temps nécessaire pour trouver le billet, et le voyageur repart, et que la terre soit ronde n’y change rien, le voyage n’a jamais cessé.
Et Ulysse ou quidam, il faut toujours trouver des astuces, des raisons, pour que le voyageur se tienne un peu là, tranquille, calmé mais pas rassasié, tu es une bête, Daniel, une sale bête.
Quelqu’un te ramènera,
Comme la marée.
Il faut aller pour se rendre, quelqu’un te ramènera, comme la marée ; tu sais, moi, je suis ici, je suis venu ici comme en revenant, tu sais, je ne sais pas si je te l’ai dit quand on était là-bas, on ne parlait pas beaucoup tous les deux, je suis du coin je pense, j’ai toujours pensé que j’étais né par là sans y avoir jamais vécu, conscient je veux dire, mais tu sais aussi ou tu ne le sais pas mais je te le dis, que je ne suis pas clair avec ça, conscient pas conscient est-ce qu’un voyageur peut dire, est-ce que tu peux me le dire, œil pour œil et risqué, que tu n’as pas dans l’idée de ne jamais revenir, que rien ne t’arrêtera ? Tu te crois plus fort que ça, la rondeur, la géométrie, tu te sens plus fortiche que la Mathématique, tu peux me le dire, à moi l’arpenteur - qui se métamorphose tu vas me répliquer, tu vas me montrer que je me déplace dans mes formes, moi, et tu auras raison, cochon, qu’un coup c’est triangle et qu’un autre c’est bien trapèze, trapèze irrégulier, bancal (mais un trapèze n’est jamais bancal, merde !), enfin flottant que je suis - tu peux me le dire aussi, alors, que tout s’annule, et les segments se cassent la gueule s’effondrent comme un château de cartes et, dans le meilleur des cas, on a un tas de cartes et il faut tout recommencer, alors tu diras que, dans cette situation, qui est la mienne mais je vais t’expliquer plus tard mon bonheur d’être revenu et ce qu’est le retour, putain, tu diras que peu importe le lieu où on bâtit la bicoque de carton puisqu’elle finit bien par tomber, tu m’auras rejoint, on sera bras dans les bras, le voyage, c’est inutile.